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Premier contact sur une ferme pour Philippe Deschamps

Le sous-préfet de Thionville, Philippe Deschamps, était reçu sur l’exploitation de la jeune agricultrice, Marie-Jeanne Reiter, le 31 mai à Rodemack. Photo Pierre Divoux
Le sous-préfet de Thionville, Philippe Deschamps, était reçu sur l’exploitation de la jeune agricultrice, Marie-Jeanne Reiter, le 31 mai à Rodemack. Photo Pierre Divoux

Le sous-préfet de Thionville a chaussé les bottes pour une rencontre avec les agriculteurs. Au programme de cette matinée, les péripéties d’une jeune agricultrice et les sujets locaux.

Rendez-vous avait été pris de longue date. Nous sommes en janvier 2023, Philippe Deschamps, tout juste nommé sous-préfet de Thionville, avait reçu la visite d’une délégation d’agriculteurs manifestant leur mécontentement contre les excès d’une réglementation environnementale aux allures de millefeuille, et préjudiciable à la compétitivité de leurs entreprises. Après moult bennes de fumier et une explication de texte dont le syndicalisme majoritaire avait affûté les arguments, il est convenu de se revoir sur une exploitation agricole.

Le sous-préfet n’a donc pas tenu rigueur de la forme de ce premier contact et c’est sur la ferme du Gaec Reiter, le 31 mai, qu’il a chaussé les bottes. Marie-Jeanne a été sollicitée par Bertrand Alesch, président cantonal de la Fdsea, pour organiser la visite.

Marie-Jeanne s’est installée en janvier 2020 dans le Gaec familial sur une exploitation de polyculture-élevage avec un atelier laitier. Une production aujourd’hui de 545.000 litres livrée chez la coopérative Sodiaal, avec un projet de développement à 645.000 litres. Sur les 75 hectares que compte l’exploitation, un troupeau de vingt vaches allaitantes complète le cheptel.

Suite à son installation et compte tenu de ses projets de développement, le Gaec a sollicité un accompagnement de ses investissements dans le cadre d’un Pcae. Le principe du Plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (Pcae) est d’aider les investissements réalisés par les exploitations agricoles. Ce dispositif est décliné dans chacun des programmes de développement rural régionaux, dont les Régions sont autorité de gestion.

«La construction du bâtiment a pris beaucoup plus de temps que prévu», témoigne Marie-Jeanne, mais son impatience résulte beaucoup plus «du retard accumulé dans l’instruction du dossier de financement». Fin octobre 2022, les travaux sont terminés, les pièces nécessaires à l’instruction du dossier au complet mi-novembre et «depuis début mars, j’attends une visite de réception des travaux, elle est nécessaire pour le versement de la subvention». Une somme qui aujourd’hui, fait lourdement défaut dans la trésorerie de l’exploitation. «C’est un cas d’école que nous avons souhaité soumettre au sous-préfet», explique le secrétaire général adjoint de la Fdsea. Jean-Baptiste Kaiser ajoute «en plus du retard pris dans l’accompagnement financier de cette exploitation en zone vulnérable, pèse l’incertitude concernant la prochaine publication du septième programme d’action de la directive nitrates». Déjà aux normes, l’élevage pourrait se voir imposer de nouveaux investissements.

Des sujets locaux

La délégation qui regroupe également un administrateur Ja, Hugo Sindt, la présidente Fdsea de Sierck, Ségolène Brabant et le secrétaire général de la Fdsea, Florent Dory, a mis à profit la présence du représentant de l’État pour aborder des sujets locaux.

En premier lieu, les sujets en relation avec les infrastructures routières. La proximité du Luxembourg et le flux de travailleurs frontaliers génèrent une saturation des réseaux. Cette densité de circulation, que les applications d’optimisation d’itinéraires basculent de plus en plus souvent sur les routes rurales, engendre des nuisances sur des tracés absolument pas calibrés pour cette affluence. La circulation des engins agricoles en devient difficile voire impossible sur certains créneaux horaires.

Les maires des communes impactées sont naturellement saisis par des administrés en demande de sécurisation des traversées de villages. Et c’est la double peine pour les agriculteurs. Rétrécissements de voies, dos d’âne, trottoirs rehaussés, se multiplient et ajoutent aux difficultés de circulation, compte tenu des gabarits des engins agricoles. Philippe Deschamps s’est donc vu charger de la mission de sensibilisation des élus afin qu’ils intègrent les contraintes des agriculteurs dans la réflexion de projets d’aménagements routiers.

Actualité oblige, le sous-préfet a été interpellé sur le récent rapport de la Cour des comptes préconisant une baisse des effectifs de bovins en France pour satisfaire aux objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Florent Dory a dénoncé «un rapport vécu comme une véritable provocation» par la profession agricole. Les éleveurs condamnent «une posture conduisant à accélérer la décapitalisation de notre cheptel», et par voie de conséquence, «encourager des importations ne répondant pas à nos critères de qualité sanitaire et de traçabilité».

Après deux heures d’un échange dense, le sous-préfet s’est engagé à faire remonter les doléances de la profession agricole. Tous ont reconnu l’intérêt de cette rencontre, et il est convenu le principe d’une visite annuelle à l’initiative des agriculteurs.