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La Moselle victime de pluies torrentielles : l’agriculture paie un lourd tribut

Bien que brutalement touchés par les intempéries, les agriculteurs ont aussi fait preuve de solidarité avec le reste de la population. Photo DR
Bien que brutalement touchés par les intempéries, les agriculteurs ont aussi fait preuve de solidarité avec le reste de la population. Photo DR

Entre le 16 et le 18 mai, un phénomène météorologique rare a provoqué des pluies exceptionnelles sur la Moselle. Partout, les stations météo battent leurs records de précipitations. De nombreux agriculteurs témoignent «de chiffres qui dépassent l’entendement», «du jamais vu». Le bilan sera lourd pour l’agriculture départementale.

C’est la sidération qui s’impose dans les campagnes le 17 mai. Pour cause, des records de précipitations pour cette journée de mai alors que les sols saturent après plusieurs mois déjà marqués par des excès d’eau.

Entre le 16 et le 18 mai, une goutte froide a traversé le nord de l’Allemagne avant le nord-est de la France. Ce phénomène météorologique a provoqué des pluies exceptionnelles sur le nord de l’Alsace et de la Lorraine.

Pluies exceptionnelles

Dès le jeudi, à 10 heures, Météo France place en «orange pluie-inondation» les départements de la Moselle et du Bas-Rhin, pour un épisode pluvio-orageux intense prévu à partir de 22 heures.

Le lendemain, à 10 heures, ces deux départements sont maintenus en «orange pluie-inondation» et Vigicrues place en «orange crues la Meurthe-et-Moselle et les Vosges».

Le même jour à 13 heures 13, Météo France passe notre département en «rouge pluie-inondation» et les quatre départements impliqués en «orange crues». Il faudra attendre jusqu’à 22 heures le retour au «jaune pluie-inondation» pour la Moselle. Nous restons encore en «orange crues», comme les trois autres départements. Mais le samedi, à 2 heures 06, Vigicrues place la Moselle en rouge crues.

À l’occasion de l’installation du Comité de suivi Inondations par le préfet mercredi en fin de journée, le bilan de la pluviométrie placera ce mois de mai 2024, alors qu’il n’est pas encore terminé, au deuxième rang des mois de mai les plus arrosés depuis 1959.

Les normales mensuelles pour un mois de mai sont comprises entre 60 et 80 mm. Du 16 au 17 mai, les cumuls relevés correspondent à un mois de précipitations, voire davantage. Et ponctuellement, les pluviomètres révèlent des chiffres qui donnent le vertige. Selon Météo France, on relèvera le 17, un cumul à Waldwisse de 81,0 mm, à Metzervisse 85,0 mm, à Hestroff 102,5 mm, à Boulay 85,8 mm, à Porcelette 98,5 mm, à Seingbouse 78,3 mm, à Kappelkinger 81,5 mm, à Volmunster 84,2 mm. Partout, les stations météo battent leurs records de précipitations. De nombreux agriculteurs témoigneront «de chiffres qui dépassent l’entendement», «du jamais vu».

Il faut ajouter à cette ampleur rarissime des précipitations, que l’indice d’humidité des sols est déjà à un niveau record pour la saison.

Des conséquences dramatiques

Au regard des premiers retours collectés par le réseau des syndicats locaux de la Fdsea, la grande majorité du département est touchée par ce cataclysme, même si une large moitié nord de la Moselle s’avère plus fortement impactée.

Plusieurs dizaines de communes sont littéralement sinistrées. Des centaines d’exploitants agricoles, tant sur leurs bâtiments, le matériel que dans les parcelles agricoles ont subi des dommages.

«L’enquête initiée par la Fdsea et relayée par le réseau Ja et les coop pointe des exemples de bâtiments inondés avec plus d’un mètre d’eau», rapporte Marc Schlemer, vice-président de la Fdsea, «on nous signale des matériels sous l’eau, mais aussi des stocks de fourrages perdus». Nous sommes loin d’un premier bilan, mais Marc Schlemer qui a assisté au Comité de suivi Inondations avec le préfet, «de nombreuses parcelles ont été recouvertes par les eaux, avec parfois un important débit, des coulées de boues et de terre ont emporté les récents semis. Les prairies, prêtes à la récolte ont été noyées, les pâtures, alors même que les animaux avaient été sortis seulement quelques jours auparavant, sont souillées». On déplore même un cas de perte de cheptel piégé par la brusque montée des eaux.

«L’urgence a été une nouvelle fois l’organisation de la solidarité pour parer au plus grave et sauver ce qui pouvait l’être», témoigne Marc Schlemer.

Urgence

Mais il faut anticiper la suite, prévient le président de la Fdsea, Fabrice Couturier. Plusieurs courriers sont déjà adressés au préfet. Fdsea et Jeunes Agriculteurs ont demandé la mise en place du processus de reconnaissance en catastrophe naturelle de notre département. Sans tarder, il a été demandé au préfet de mobiliser les services fiscaux pour l’organisation d’un dégrèvement collectif de la Tfnb. Le syndicalisme majoritaire a également saisi la Msa pour accompagner les agriculteurs dans cette situation difficile. «Nous multiplions les prises de contact afin de mobiliser tous les leviers possibles», explique Fabrice Couturier. Le président de la Fdsea a, par ailleurs, convoqué le Collège de l’agriculture française (Caf) dans sa composition mosellane pour les premiers jours de juin. «J’ai demandé aux membres du Caf de Moselle de préparer les organisations professionnelles agricoles départementales à accompagner les agriculteurs dans cette passe très délicate».

Bien que brutalement touchés par les intempéries, les agriculteurs ont aussi fait preuve de solidarité avec le reste de la population. Tracteurs, bétaillères et autres télescopiques ont été déployés dans les zones rurales rendues difficilement accessibles. Ici, les pompiers étaient transportés en tracteur, ailleurs c’est un établissement scolaire qui a pu être évacué. Un agriculteur au volant de son tracteur attelé d’une bétaillère a mis plusieurs heures pour extraire plusieurs centaines d’élèves piégés par les eaux.