Le mouvement de contestation agricole touche au moins quatre-vingt-cinq départements français. Afin de répondre à la colère des agriculteurs, le tout nouveau Premier ministre était en charge de présenter les réponses du gouvernement à une crise et une mobilisation exceptionnelles. Pour Fnsea et Ja, il s’impose de remettre l’ouvrage sur le métier.
En déplacement le 26 janvier dans un élevage bovin à Montastruc-de-Salies (Haute-Garonne) pour répondre aux manifestations des agriculteurs, le Premier ministre n’aura pas su convaincre. S’il n’est pas venu les poches vides, de trop nombreux sujets de revendication restent en suspens selon les syndicats majoritaires qui déclaraient dans un communiqué diffusé sur leurs réseaux, à l’issue de la prise de parole de Gabriel Attal, «nous sommes loin du compte. Beaucoup de sujets n’ont même pas été évoqués».
Gazole non routier
La renégociation de la fiscalité du Gnr était au menu des attentes de la profession. Rien de surprenant de voir le Premier ministre faire de cette question un point fort de ses déclarations vendredi dernier. Ainsi, il a annoncé «l’arrêt de la trajectoire de hausse du Gnr». La hausse progressive de la taxation du Gnr, souhaitée par Bruno Lemaire et prévue jusqu’en 2030 est donc abandonnée.
Gabriel Attal a dit «assumer» cette «décision de bon sens» qui n’aura, selon lui, «aucun impact sur les finances publiques». Par ailleurs, le chef du gouvernement a annoncé la «déduction de l’exonération en pied de facture», comme demandé par la Fnsea. «Quand vous serez livrés en carburant, la déduction sera faite immédiatement, et l’État compensera les distributeurs», a-t-il détaillé.
Le Premier ministre a dit vouloir mettre fin au «système kafkaïen» dans lequel les agriculteurs devaient acheter leur carburant, puis être remboursé l’année suivante. Enfin, Gabriel Attal a indiqué que les pouvoirs verseront plus tôt que prévu, «dès le mois prochain» une avance de 50 % sur l’exonération du Gnr, soit 215 M€.
Aides d’urgence
Le Premier ministre a également annoncé des enveloppes en hausse pour plusieurs aides d’urgence, ainsi que l’accélération des versements. L’indemnisation des frais vétérinaires due à la maladie hémorragique épizootique (Mhe) doit être portée à 90 %, au lieu des 80 % annoncés par le ministre de l’Agriculture le 19 janvier.
Ces aides Mhe totaliseront 50 M€, ce qui constituera «une première mise», selon Gabriel Attal. On sait qu’avec l’arrivée du printemps, et la circulation des vecteurs de la maladie, l’épizootie est susceptible de causer de nouveaux dégâts. Le guichet pour ces indemnisations «ouvrira d’ici le 5 février». Les versements sont programmés «très vite, à partir de février».
Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé que le gouvernement «va remettre 50 M€» dans les dispositifs d’aide aux producteurs bio, après les 94 M€ d’aides de ces derniers mois.
Enfin, Gabriel Attal a annoncé vouloir «doubler le fonds d’urgence pour la Bretagne» qui a été mis en place après la tempête Ciaran, en novembre. Destiné à trois régions (Hauts-de-France, Bretagne et Normandie), ce fonds était initialement doté de 80 M€, puis abondé de 15 millions d’euros.
Simplification : dix mesures
Lors de son déplacement en Haute-Garonne, Gabriel Attal a annoncé prendre «dix mesures immédiates de simplification» qui feront l’objet de décrets «demain et la semaine prochaine». Entre autres, «on va abroger le délai exceptionnel» de quatre mois pour déposer un recours contre les projets agricoles ; celui-ci «passera à deux mois» comme pour l’ensemble des entreprises. Par ailleurs, Gabriel Attal a indiqué que «l’Ofb sera sous la tutelle des préfets» et qu’une réflexion sera menée pour «faire baisser le niveau de pression» lors des contrôles environnementaux. Le chef du gouvernement a aussi annoncé le passage à un «contrôle administratif unique» : les préfets devront élaborer des «plans de contrôle» dans les exploitations avec un objectif de «pas plus d’un passage dans l’année».
Autre mesure concernant les haies : «On va passer de quatorze réglementations à une seule», a encore promis Gabriel Attal. D’autres mesures avaient déjà été annoncées, comme l’accélération des projets de stockage d’eau, la création d’une «présomption d’urgence», ou encore l’accélération des autorisations pour le curage des cours d’eau. Par ailleurs, le gouvernement lance un «mois de la simplification» d’ici le Salon de l’agriculture, invitant les représentants agricoles à travailler avec les préfets sur des simplifications de procédures au niveau départemental.
La mobilisation se poursuit
À la veille des annonces du Premier ministre, le président de la Fnsea, Arnaud Rousseau, et celui de Ja, Arnaud Gaillot, s’étaient rendus, le 25 janvier dans l’Yonne, pour soutenir leurs adhérents sur le terrain. L’occasion pour eux de marteler leurs revendications en attendant de connaître les décisions gouvernementales. Les deux responsables syndicaux avaient d’ailleurs prévenu le gouvernement : «cette centaine de propositions n’est pas une base de négociation». La reprise «intégrale» de celles-ci est une condition sine qua non pour aboutir à une sortie de crise.
C’est donc logiquement que les deux réseaux Fnsea et Ja appellent à poursuivre l’action. «Nous ne cesserons pas le mouvement, ni sur les routes, ni auprès du plus haut niveau de l’État». La Fnsea attend «des explications claires et détaillées, sur les mesures annoncées par Gabriel Attal mais aussi pour toutes les mesures sur lesquelles il a fait