Depuis le 1er avril, une autorisation administrative est nécessaire pour toute modification sociétaire conduisant à une prise de contrôle au-delà de 222 hectares.
Le développement exponentiel des sociétés agricoles a mis en évidence un problème de contrôle du foncier. Pour remédier à cette situation, la Loi d’avenir agricole de 2016 avait élargi le champ d’application du droit de préemption des Safer à la cession intégrale des parts de société.
Cette mesure s’avérant peu efficace, une nouvelle loi, portée par le député Jean-Bernard Sempastous (Hautes-Pyrénées), a été adoptée le 13 décembre 2021 instaurant un nouveau mécanisme de contrôle des cessions de parts de société. Ce dispositif s’applique aux opérations réalisées depuis le 1er avril 2023.
Les opérations soumises à contrôle
Deux conditions cumulatives doivent être remplies pour que l’opération soit soumise à contrôle :
- une prise de contrôle par une personne physique ou morale détenant en propriété ou en jouissance des biens immobiliers agricoles dont la superficie excède ou excédera à la suite de l’opération, un seuil d’agrandissement significatif fixé à 222 hectares pour l’ensemble de la région du Grand Est (hormis les petites régions «Montagne Vosgienne» où le seuil est de 129 ha),
- une prise de contrôle ou prise de participation, par l’acquisition de titres conférant à la personne (physique ou morale) le contrôle de la société.
Une personne est présumée exercer le contrôle lorsqu’elle dispose directement ou indirectement d’une fraction des droits de vote supérieur à 40 %, et qu’aucun autre associé ne détient une fraction supérieure à la sienne.
Les personnes qui, à la suite d’une modification de la répartition des parts obtiennent une répartition égalitaire des droits de vote, ne sont pas soumises à autorisation dans la mesure où aucun associé ne détient une fraction supérieure aux autres.
Les opérations concernées :
- prise de participation par acquisition de titres (parts sociales),
- modification de la répartition du capital social ou des droits de vote qui aboutit à transférer le contrôle de la société à un nouveau bénéficiaire,
- prise de participation complémentaire,
- prise de contrôle d’une société contrôlant directement ou indirectement une autre société remplissant les conditions de contrôle (holding).
Les opérations échappant au contrôle :
- les opérations réalisées à l’amiable par la Safer dans le cadre de ses missions ou dans l’exercice de son droit de préemption,
- les opérations à titre gratuit (succession, donation),
- les cessions intra familiales (entre époux, partenaires Pacs, parents ou alliés jusqu’au quatrième degré) à la condition que :
* soit le cessionnaire s’engage à participer effectivement à l’exploitation des biens pendant au moins neuf ans, et conserve la totalité des titres acquis pendant au moins neuf ans,
* soit le cessionnaire s’engage à louer les biens au profit d’un locataire s’engageant lui-même à les exploiter pendant au moins neuf ans.
- les cessions de parts sociales entre associés détenant depuis au moins neuf ans des titres dans la société et participant effectivement à l’exploitation des biens.
La procédure d’autorisation
L’instruction de la demande est encadrée par de nombreux délais (pouvant aller jusqu’à plus de neuf mois).
La déclaration est déposée sur le site de la Safer via un portail de télédéclaration. Les frais de dossier s’élèvent à 300 € Ht, à acquitter via le portail (uniquement pour les opérations soumises à autorisation).
Si le dossier est complet, la Safer accuse réception du dossier dans un délai de dix jours et le transmet au préfet. Elle procède à la publicité de la demande dans le délai de quinze jours à compter de l’accusé de réception (publicité pendant un mois sur le site de la Safer).
Le premier délai, le plus important, accorde quatre mois au préfet pour statuer sur la demande d’autorisation à compter de la date d’accusé de réception de la demande. À défaut de notification d’une décision, l’opération est réputée autorisée.
À l’intérieur de ces quatre mois, la Safer dispose de deux mois à compter de la demande pour rendre son avis, délai à l’expiration duquel son accord est réputé tacitement accordé. Elle doit consulter le Comité technique départemental.
Trois cas de figure peuvent être rencontrés :
- aucune décision dans le délai de quatre mois, l’opération est autorisée (autorisation tacite),
- autorisation expresse par arrêté préfectoral,
- refus avec notification au demandeur des motifs qui s’opposent à l’opération.
La loi accorde au demandeur une chance de remédier à ce refus. Dans un délai d’un mois, le demandeur peut proposer à la Safer des mesures compensatoires. Il peut s’engager :
- s’il est propriétaire, à vendre ou louer par bail à long terme à un jeune agriculteur (ou à un agriculteur réalisant une installation), une partie de son foncier,
- s’il est locataire, à libérer du foncier au profit d’un jeune agriculteur (ou à un agriculteur réalisant une installation) ; le propriétaire des biens doit s’engager à les vendre ou les louer au Ja.
L’instruction du dossier reprend mais les délais sont divisés par deux.
La Safer lui délivre un accusé de réception (dans les cinq jours) et transmet un avis sur les mesures sous un mois.
Le préfet dispose de deux mois à compter de l’avis de réception (voire quatre mois en cas de demande d’éléments complémentaires), pour notifier sa décision : autorisation sans condition, autorisation conditionnelle ou refus.
Publicité
La décision préfectorale est publiée au recueil des actes administratifs et transmise à la Safer.
Sanctions
Avant toute sanction, la Ddt entame une procédure contradictoire pour recueillir les observations de l’auteur du manquement.
- si aucune demande n’a été déposée, l’opération (de cession-modification) est annulée avec effet rétroactif. Le préfet peut également prononcer une amende administrative allant de 1.500 € à 2 % du montant de la transaction.
- en cas de non-respect des engagements proposés dans le délai de six mois, le préfet met en demeure le contrevenant de régulariser sa situation ; à défaut, il prononce un retrait de la décision d’autorisation (annulation) et une sanction financière (entre 304,90 € et 914,70 € pour chaque hectare faisant l’objet de l’engagement).
Pour toute question complémentaire, prendre contact avec la Fdsea.