Au-delà de l’obligation de contrat imposée par la loi Besson-Moreau, l’amélioration du revenu des éleveurs viendra des clauses de ce contrat et tout particulièrement du prix sur lequel éleveurs et acheteurs doivent trouver un accord.
«L’essentiel de la loi Besson-Moreau est de renverser la logique où l’éleveur est toujours la variable d’ajustement de la filière», résume Francis Jacques, responsable “section bovine” de la Fdsea. «Une logique destructrice de valeur» selon l’élu professionnel, «où l’éleveur tire toujours la courte paille».
Depuis le 1er janvier 2022, la Loi Besson-Moreau rend obligatoire la contractualisation écrite pour toute vente de bovins. Cette obligation s’applique aux races à viande pour Jb, génisses, vaches, et tous les bovins sous signe officiel de qualité. Pour les bovins maigres de race à viande (“broutards”), l’obligation court, à compter du 1er juillet 2022. Et pour les autres catégories de bovins au plus tard au 1er Janvier 2023. Mais au-delà de l’obligation de contrat, l’amélioration du revenu des éleveurs viendra des clauses de ce contrat et tout particulièrement du prix sur lequel éleveurs et acheteurs doivent trouver un accord. «Là encore, la loi nous aide puisque la proposition initiale de contrat doit être présentée par l’éleveur, et non par l’acheteur», précise Francis Jacques. Concernant le prix dans le contrat, il conseille aux éleveurs de «choisir la formule du prix dite “déterminable”, c’est-à-dire une formule de calcul avec indicateurs et mention des modalités d’actualisation de leur valeur».
Trouver un accord
Dans le cas d’un contrat avec une option dite de prix “déterminable”, conseillée par la Fédération Nationale Bovine (Fnb), il s’agit de faire figurer au contrat une formule de calcul utilisant des indicateurs puis de négocier leur pondération. Ce sera le résultat de l’application de cette formule de calcul qui détermine le prix à chaque enlèvement, en fonction de la valeur actualisée des indicateurs. La loi demande que la formule se base sur un indicateur de coût de production, et précise qu’en outre, peuvent être intégrés des indicateurs relatifs aux prix constatés sur les marchés (cotations) et des indicateurs relatifs à la qualité du produit concerné par le contrat. La formule de calcul finale définissant le prix peut ainsi être sous la forme suivante :
(1) Indicateur de coût de production x ….% de pondération
(2) + Indicateur de prix de marché (cotations) x … % de pondération
(3) + selon le cas, Indicateur de “valorisation bouchère selon races” - sans pondération.
Coût de production
Pour l’indicateur de coût de production, les éleveurs peuvent utiliser les valeurs de référence résultant de l’accord interprofessionnel (voir l’encadré ci-dessous). «À la suite de la demande de la Fnb, qui exigeait une publication des indicateurs de référence de coût de production en viande bovine par l’Idéle tel que prévu par la loi Egalim 2, l’Institut de l’Élevage a publié une page sur son site internet», souligne Francis Jacques. Cette page reprend les indicateurs de référence pour les gros bovins de type viande en système conventionnel selon la méthode validée par accord interprofessionnel. «Ces indicateurs sont donc maintenant publics et accessibles directement», se satisfait le responsable “section bovine“ de la Fdsea. «Les éleveurs étaient impatients de pouvoir accéder à cette information», précise-t-il. Et la page sera mise à jour prochainement avec d’autres indicateurs de coût de production, dont ceux en agriculture biologique.
Prix de marché
Pour l’indicateur de prix de marché (cotations), les éleveurs peuvent se référer aux valeurs diffusées par FranceAgriMer sur son site internet, concernant les cotations “entrée-abattoir” en bovins finis (déduire les frais d’approche élevage-abattoir) et les cotations “bovins maigres”. Pour un indicateur de “valorisation bouchère selon races”, les éleveurs peuvent par exemple utiliser les valeurs observées dans les cotations officielles de FranceAgriMer, afin d’ajouter dans la formule de prix au contrat, une valeur représentative de l’écart de certaines races plus valorisées sur le marché. Si le contrat concerne des animaux Label rouge ou sous cahier des charges spécifique, il faut penser à un “indicateur de surcoût” lié aux exigences supplémentaires inscrites dans le cahier des charges. Par exemple, en Label rouge, l’interprofession a défini un indicateur de surcoût, lié notamment au coût de l’alimentation non Ogm et à la certification, actualisé périodiquement. Enfin, en complément de la formule de calcul qui définit le prix pour “l’animal de référence” du contrat (par exemple, pour un contrat en Jb, il peut être choisi la conformation “U-” pour “l’animal de référence de la formule de prix”), il est nécessaire de mentionner une clause relative aux écarts à appliquer pour des classes de conformation différentes : - conformation supérieure (+ … cts d’euros par kg carcasse par tiers de classe) - inférieure (- … cts d’euros par kg carcasse par tiers de classe).
Passer des hausses
Sur le second semestre 2021, il a pu être constaté une embellie des cotations, notamment sur le jeune bovin. Dans les campagnes, nombre d’acteurs se félicitent de ces signaux, mais selon Francis Jacques, «il est clair que cette augmentation de cotation ne sert qu’à combler la flambée du coût de production». Bruno Dufayet, président de la Fnb, avoue «qu’il n’a jamais été aussi facile, pour des opérateurs, de passer des hausses de prix profitables aux éleveurs !». Il se réjouit, «le Salon de l’agriculture arrive donc à point nommé, dans un contexte inédit ; nous profiterons de ce coup de projecteur sur notre secteur pour nous assurer que chaque acteur de la filière concrétise ses engagements et applique strictement la loi».