Si la profession a bien été entendue pour le dégrèvement de la taxe foncière sur les propriétés non bâties, la demande de reconnaissance en calamités agricoles n’est que très partiellement obtenue. La profession agricole n’accepte pas une méthode qui ignore l’expertise du terrain.
Pas le moindre doute dans la tête de tous les éleveurs du département. L’été 2022 restera marqué d’une pierre blanche. Après une année 2021 très pluvieuse, l’année 2022 éjecte du podium 1976 qui était, jusqu’à aujourd’hui, notre référence à tous en matière de sécheresse.
Localement, les services de l’État confirment le diagnostic, sur la base des données météorologiques évidemment. Mais aussi grâce à la mission d’enquête mandatée par le préfet sur un échantillon représentatif d’exploitations du département. Et ce n’est pas la pousse tardive de l’automne qui a permis de corriger les dégâts de l’été.
Dès le mois de juin, l’ensemble de la Moselle subit un climat chaud et sec. Des records de chaleur sont battus et il faudra faire le triste constat d’une absence de pluie à partir de juillet. Les chiffres ne souffrent pas la contestation d’une situation calamiteuse. On constate, un recul de 90 % des précipitations en juillet et de 65 % à 90 % en août, suivant les petites régions agricoles.
La conséquence s’avère dramatiques. Aucune pousse d’herbe durant tout l’été. Les éleveurs s’épuisent dans des allers-retours pour abreuver et fourrager leurs troupeaux au parc.
Au mieux, il faut taper dans les stocks théoriquement réservés pour l’hiver à venir. Parfois, l’achat de fourrages est nécessaire. Dans les situations les plus difficiles, la décapitalisation s’impose.
Autre effet de cet épisode calamiteux, la qualité des maïs n’est pas bonne. Il y a très peu de grains et le manque d’eau pénalise la croissance et le développement de la plante.
La mission d’enquête, pilotée par les services de l’État, et plusieurs dizaines de bilans fourragers témoignent de la réalité du terrain. Les pertes moyennes dans le département s’élèvent à plus de 51 % pour les prairies et 46 % pour les maïs.
Le choc
Le dossier de demande de reconnaissance de la Moselle en calamités agricoles a donc été instruit pour un passage en Comité national de gestion des risques agricoles (Cngra), le 18 janvier dernier.
Douche froide pour les représentants de la profession agricole ce 18 janvier. Le Cngra n’a pas tenu compte des données de la mission d’enquête réalisée par les services de l’État sur le terrain.
Son analyse de la pousse d’herbe se réfère à des données satellites (Airbus) comparées à une moyenne olympique sur cinq ans, période à laquelle on retire la meilleure et la plus mauvaise référence. Pour notre département, la méthode conduit à comparer une année calamiteuse à trois mauvaises années. Le taux de perte calculé ainsi bascule la grande majorité du territoire mosellan sous le seuil de reconnaissance en calamités agricoles.
«Aujourd’hui, ce n’est qu’un tiers du département qui est reconnu et les grandes zones d’élevage en sont exclues», s’insurgent les secrétaires généraux de la Fdsea et des Jeunes Agriculteurs. De ce fait, les éleveurs ne pourront donc pas prétendre aux indemnités qui leur sont dues. Les élus professionnels rappellent que le Fonds national des calamités est abondé par les cotisations d’assurance des agriculteurs. Ils dénoncent une situation inacceptable.
Mobilisation
Le mot d’ordre est simple. Pour la Fdsea et les Jeunes Agriculteurs de la Moselle «tout le département de la Moselle doit être reconnu en calamités agricoles, l’ensemble de la Moselle a été sinistré par cette sécheresse exceptionnelle».
Pour faire entendre leur mécontentement, les réseaux Fdsea et Ja se sont mobilisés le 26 janvier devant les sous-préfectures.
Thionville, Sarrebourg, Sarreguemines et Forbach ont regroupé plus de 70 tracteurs et 150 manifestants. Carte postale odorante de la part des éleveurs à l’attention d’un État qui néglige une profession malmenée par les évolutions du climat, mais partout, un échange avec les représentants du gouvernement.
Les arguments de la profession ont été défendus pour insister sur le caractère essentiel de l’indemnisation attendue.
Tfnb c’est parti
Du coté de Metz, les manifestants avaient préparé une visite dans les locaux des services fiscaux. À cette adresse, c’est la lenteur d’exécution que la profession agricole souhaitait dénoncer.
Depuis le 12 décembre, le courrier de formalisation de la demande de dégrèvement de la Taxe foncière sur les propriétés non bâties (Tfnb) restait sans réponse. Il aura suffi du vent du boulet pour activer la Ddfip. Dans une missive parvenue par mail le 25 janvier à la Fdsea, le Directeur départemental des finances publiques répond favorablement à la demande professionnelle. Le taux de perte a été fixé à 78 % sur les parcelles agricoles classées en pré, sans distinction de zone dans le département. La procédure de dégrèvement d’office a donc été mise en place.
Le soir même de la manifestation, le préfet recevait la profession agricole dans le cadre de la préparation du congrès de la Fnb à Metz. Une opportunité saisie de part et d’autre pour, une nouvelle fois, reprendre les arguments en faveur d’une réouverture du dossier des calamités agricoles et d’une reconnaissance de l’intégralité du département de la Moselle.