Mickaël Jacquemin, agriculteur dans la Marne, représentant de la Fnsea au sein de l’Association nationale pour l’emploi et la formation en agriculture (Anefa) où il siège en tant que secrétaire général, évoque son action en faveur des employeurs agricoles.
La nouvelle convention collective nationale de la production agricole et des Cuma a été signée le 8 octobre 2020 pour entrer en vigueur au 1er avril 2021. Quel rôle a joué la Fnsea ?
Mickaël Jacquemin : «Dans le cadre des discussions relatives à la nouvelle convention collective nationale qui concerne toutes les entreprises de la production agricole et les Cuma, la Fnsea a joué un rôle important parce que c’est la seule organisation patronale représentative au niveau agricole. La Fnsea a négocié avec les cinq centrales syndicales de salariés. J’ai eu la chance d’être identifié comme négociateur national. Durant trois années, j’ai participé à tous les travaux. À l’origine, il y avait 144 conventions collectives territoriales qui ont dû laisser la place à une seule».
Quel intérêt d’avoir investi dans cette réécriture ?
M. J. : «Nous avions deux postures possibles. Soit ne pas respecter la loi, mais il en était hors de question. Le ministère du Travail était très attentif à ce que la branche agricole négocie cette nouvelle convention collective. Cela nous était imposé par le fait que la Fnsea soit la seule organisation patronale représentative. Nous n’avons pas eu vraiment le choix et c’était normal que l’on mène ce travail de négociation et de réécriture».
Quelle stratégie d’accompagnement assurez-vous pour les employeurs ?
M. J. : «Tout au long de la négociation, les employeurs étaient informés qu’une nouvelle convention nationale était en cours d’écriture et que cela entraînerait des ajustements et des changements, c’est-à-dire entre autres dans les paramétrages de la fiche de paie. Dès que la convention collective a été signée et étendue, après la validation par les pouvoirs publics, tout le réseau Fnsea s’est activé pour communiquer dessus. La diffusion de l’information s’est appuyée sur les différents outils : les Fdsea, la presse départementale agricole et un site internet. La plateforme www.convention-agricole.fr permet de retrouver tous les éléments pour comprendre et mettre en pratique la nouvelle convention collective. Des webinaires ont été assurés par les territoires pour bien expliquer aux employeurs les évolutions à venir dès le 1er avril 2021. La principale nouveauté, à l’initiative de la Fnsea, est la grille de classification pour laquelle il a fallu convaincre les organisations salariales. Dorénavant, une nouvelle méthodologie de classement des emplois par points est basée sur des compétences et des critères classants. Les cinq critères retenus nous semblaient indispensables et même judicieux vis-àvis de la posture de l’employeur tout en permettant de favoriser l’évolution professionnelle des salariés : technicité, autonomie, responsabilité, management et relationnel».
Vous portez partout le message d’une agriculture qui peine à recruter. Quelles actions avez-vous engagées pour y remédier ?
M. J. : «Les actions sont nombreuses et ne sont pas décrétées par une personne ou par le national. C’est chaque territoire, chaque département qui doit être acteur de cette communication. Nous incitons à ce que tout le monde parle avec les mêmes éléments de langage. Il faut utiliser des témoignages, des visites et des conférences pour orienter vers le salariat agricole. Ces jours-ci, je reçois dans le cadre de la semaine des métiers de l’agriculture de l’Anefa, un bus de ressortissants de Pôle Emploi : j’ai demandé à mes salariés d’être présents pour échanger avec ces demandeurs d’emploi. Mes collaborateurs ont des profils très différents, dont un seul de formation agricole et cela se passe très bien, qui de mieux qu’eux peuvent le dire».
Comment analysez-vous ce déficit de main-d’œuvre ?
M. J. : «Nous n’avons pas été assez performants jusqu’à présent dans notre message sur le fait que l’agriculture recrute. Il y a une mauvaise image de nos métiers par méconnaissance. Il faut mettre en place des plans d’actions. Toutes les filières, toutes les branches, tous les territoires doivent se mobiliser sur le sujet».
Quels sont les métiers dont vous avez besoin ? Et où sont-ils localisés ?
M. J. : «Dans la région Grand Est, nous recherchons trois grands profils. Il y a une vraie pénurie de tractoristes en grandes cultures et en viticulture. En sachant que la viticulture, pour ne parler que d’elle, s’engage de plus en plus dans un mode de conduite plus durable, avec moins de chimie et plus de désherbage mécanique augmentant les besoins en main-d’œuvre. Les secteurs de productions viticoles et arboricoles ont un besoin important de personnel pour tailler et entretenir les cultures tout au long de l’année. En polyculture-élevage, il y a un manque de salariés avec vocation à travailler au contact des animaux».
À plus long terme, quels seront les nouveaux métiers sur lesquels l’agriculture recrutera ?
M. J. : «Les métiers de demain seront de plus en plus techniques, en lien avec les nouvelles technologies aussi bien pour la conduite d’engins que sur le suivi de l’élevage que dans la pratique de la diversification, de la transformation et de la commercialisation des produits».
Quel est le quotidien d’un syndicat représentatif des employeurs de main-d’œuvre ?
M. J. : «C’est d’être en veille permanente sur la réglementation et les nouvelles lois sociales. Il nous faut être force de proposition dans les négociations pour ne pas subir».