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«Il y a de l’avenir dans l’élevage»

Béatrice Moreau, vice-présidente déléguée à l’Agriculture, évalue l’accompagnement de projet par la Région «entre 150 et 200 millions». Photo Pierre Divoux
Béatrice Moreau, vice-présidente déléguée à l’Agriculture, évalue l’accompagnement de projet par la Région «entre 150 et 200 millions». Photo Pierre Divoux

Consciente du contexte difficile dans lequel évolue l’élevage, la Région propose d’accompagner une «transition nécessaire». «Ce n’est pas simple», constate la vice-présidente déléguée à l’Agriculture. Mais Béatrice Moreau affiche la «volonté de partager une ambition collective».

Les chiffres sont têtus. Et le Grand Est n’échappe pas à la tendance nationale. Les effectifs de bovins dégringolent depuis plusieurs années maintenant.

Dans le même temps, et pour cause, l’élevage encaisse, trop souvent au goût des éleveurs et de leurs représentants professionnels, les coups de butoir des législations nationale et européenne. Accords de libre-échange, révision de la directive Ied (émissions industrielles), extension des zones vulnérables et septième programme de la directive nitrates, sont des exemples récents. Et pour l’actualité, l’environnement sanitaire n’a rien de serein.

Dans ce contexte peu amène, le Conseil Régional ne veut pas se résoudre à la fatalité d’une disparition programmée d’un pilier du système de polyculture-élevage caractéristique de l’identité agricole du Grand Est.

Aussi, à la demande du président de la Chambre d’agriculture, Béatrice Moreau a présenté, le 28 novembre, aux membres de la session, le projet “Ambition Éleveurs”. La vice-présidente déléguée à l’Agriculture a détaillé ce projet de la collectivité «pour encourager un élevage compétitif et durable», visant à «entraîner massivement les exploitants agricoles dans une transition durable».

Polyculture-élevage

Dans une «approche partagée» avec le réseau des Chambres d’agriculture, la collectivité s’est fixé comme «priorité d’action, les exploitations de polyculture-élevage». Elles représentent, dans le Grand Est, une exploitation sur deux, hors viticulture. Et si ces entreprises s’avèrent «des systèmes vecteurs de solutions aux enjeux régionaux, nationaux et mondiaux», selon Béatrice Moreau, «ce sont des systèmes fragiles» ; économiquement, «dans un contexte de volatilité des prix des intrants, de l’énergie, et des productions agricoles». Fragiles «socialement aussi». La vice-présidente déléguée à l’Agriculture a évoqué la perception négative par la société et le «déficit d’attractivité», un obstacle au renouvellement des générations. Troisième source de fragilité identifié par la collectivité, «la vulnérabilité face aux changements climatiques».

Les principes

«Nous avons la volonté de reproduire ce que la Région a fait ces deux dernières années avec le Pcae» explique Béatrice Moreau. Voilà pour le calibrage du dispositif. Les principes fondateurs du projet “Ambition Éleveurs” seront d’entraîner massivement les entreprises agricoles dans une transition vers la multi-performance -sous-entendu économique, sociale et environnementale- en accompagnant «2.000 exploitations de polyculture-élevage en cinq ans dans un parcours de transformation de leur système». Et pour pallier à la difficulté des chefs d’exploitation «à sortir la tête du guidon pour réfléchir à une stratégie», la collectivité «offre un accompagnement innovant qui repose sur une approche globale». «Ce n’est pas simple», constate la vice-présidente déléguée à l’Agriculture. Mais elle affiche la «volonté de partager une ambition collective».

Transformation collective

Le programme élaboré par la collectivité appréhende l’exploitation «dans son territoire et en cohérence avec la stratégie de son aval». Cette «transformation collective» attendue vise aussi à «structurer et consolider les filières», explique Béatrice Moreau. En déclinant le projet au travers d’impacts attendus, elle livrait à titre d’exemple, «la réduction de 10 % de la consommation d’eau, l’augmentation de 15 % de l’autonomie fourragère, la réduction de la part de carburant fossile», ou encore, «la réduction du recours aux engrais de synthèse».

Ce programme s’appuiera sur trois piliers.

Le premier, en cours de réalisation, vise à recruter soixante fermes de démonstration. Elles assureront l’expérimentation et le transfert des innovations. Pour le département de la Moselle, «cinq exploitations seront proposées à la Région, auxquelles s’ajoutent les fermes des deux lycées agricoles du département» explique Xavier Lerond.

Vient ensuite l’étape de massification avec 2.000 parcours de transformation personnalisés basés sur du conseil stratégique et du conseil thématique au service de la mise en œuvre de transformations et d’investissements ciblés.

Enfin, la Région soutiendra «dix à quinze projets collectifs de territoires ou de filières» et de citer comme exemple «la recherche d’un groupe à l’initiative d’une idée de production d’énergie, avec un projet structuré sur une grappe locale en partenariat avec des entreprises utilisatrices».

Le débat initié par la présentation du projet “Ambition Éleveurs” a suscité plusieurs objections. Peu sur le projet en lui-même. Les membres de la session ont plutôt exprimé leur lecture du contexte général conduisant à la décapitalisation des cheptels. En plus de l’environnement réglementaire, les inquiétudes sanitaires étaient évoquées par le président du Gds, Gilles Canteneur. Les contraintes de main-d’œuvre exprimées par plusieurs participants ont suggéré l’intérêt d’accompagner les formes de salariat partagé et la formation de ses personnels.