La coopérative tenait jeudi 16 novembre son assemblée générale de la section élevage à Condé Northen. À cette occasion, Dominique Guineheux, du Groupe Bigard était invité pour donner sa vision du marché de la viande bovine.
Après le traditionnel mot d’accueil du président, Fabien Cremel, responsable de l’activité élevage au sein du Groupe Lorca, est intervenu pour présenter l’activité. Le contexte climatique a été évoqué avec «une année qui se finit bien avec une belle arrière-saison qui a permis de faire du fourrage». Malgré un effectif bovin qui ne cesse de diminuer, moins 910.000 têtes en sept ans, Lorca Élevage a maintenu sa croissance en collectant 24.810 animaux (+ 6,7 % par rapport à l’exercice précédent). Les principales variations s’observent sur les veaux (+ 15 %), les Jeunes Bovins (+ 6,5 %) et les broutards (+ 5,2 %).
Fabien Cremel a évoqué ensuite les cours, avec des cotations en hausse de 17 % par rapport à 2022 pour les animaux de race à viande, et de manière encore plus marquée, pour les Jb lait (+ 25 %) et vaches laitières (+ 23 %). En viande, toutes les catégories ont pris entre 80 centimes et 1 euro. Le responsable d’activité évoque ensuite la contractualisation qui continue sa progression avec 1.341 animaux labélisés, ce qui représente 25 animaux par semaine. La part d’animaux contractualisés sur le dernier exercice représente 40 % du volume. Il note enfin que les plus-values contrat filière représentent une bonification de 16 centimes par kilo de carcasse, une reconnaissance pour les éleveurs qui s’investissent.
En conclusion de son rapport d’activité, Fabien Cremel a évoqué les traditionnelles ristournes et remises de fin de campagne qui s’élèvent à 158.000 euros.
Une consommation qui se maintient
Fabien Cremel a poursuivi ses propos par la conjoncture française en termes de consommation de viande bovine. Globalement, elle se maintient malgré l’inflation mais on note une forte augmentation de l’importation de viande étrangère en restauration hors domicile. Autre fait marquant, l’achat par les ménages de viande bovine recule de 6 % dans les grandes surfaces et la consommation se tourne plutôt vers la restauration hors domicile.
En conclusion, Fabien Cremel note qu’au meilleur des cotations, la viande bovine était payée en France quasiment 1 euro de plus que chez nos voisins et notamment en Allemagne, ce qui fait la part belle aux importations pour aller chercher un prix. Le président de Lorca a rebondi sur les prix, suite à la question d’un éleveur, en confirmant que la coopérative faisait le maximum pour que les prix se maintiennent mais qu’elle travaille surtout sur les coûts de productions. Au-delà, face à la réglementation, au coût du travail et face aux différentes charges, la coopérative n’a pas de marge de manœuvre.
Nouvel extranet élevage
Pascal Kardacz a profité des travaux d’assemblée générale pour détailler toutes les possibilités offertes aux éleveurs utilisateurs de l’extranet élevage. Il explique que chaque producteur pourra bénéficier d’un maximum de données pour son élevage, avec des analyses par lot, des annonces de sorties d’animaux, une plateforme d’échanges de documents. À l’issue d’un film de présentation de ce nouvel outil, il a annoncé la création d’un club utilisateurs pour s’approprier de la meilleure des manières ce nouvel espace et pour en faire la promotion.
Des résultats très satisfaisants
Pour clôturer les travaux statutaires, Philippe Dessertenne, directeur général du Groupe Lorca, a présenté le rapport financier. Il souligne dans un premier temps que l’activité de la coopérative élevage progresse de 7 % en volume quand la tendance nationale est plutôt à une baisse de 9 %. Il poursuit avec la partie financière en soulignant que la croissance est surtout liée à la valeur qui augmente. Le chiffre d’affaires s’élève ainsi à 41,9 millions d’euros (+ 21 % par rapport au dernier exercice) pour un résultat net de 102.000 euros (47.000 euros pour N-1). Le président, quant à lui, a conclu sur une explication simple du commerce : «le commerce c’est simple, il faut trouver le meilleur compromis entre le produit et les attentes et le bon prix est celui qui convient à l’acheteur et au vendeur. C’est là que se situe le travail de la coopérative !».
Questions réponses à Dominique Guineheux
La deuxième partie de l’assemblée générale était articulée autour d’un jeu de questions-réponses organisé par Philippe Dessertenne à l’intention de l’invité, Dominique Guineheux, directeur des achats de bovins du Groupe Bigard et directeur viande.
La première interrogation concernait les faits marquants de l’exercice. Monsieur Guineheux a noté une inversion par rapport à 2022 avec une recrudescence des viandes d’importation qui représentent 25 % des volumes consommés. Pour le groupe Bigard, cela s’est traduit par une grande disponibilité de bovins mais une baisse d’abattages suite à la diminution de la demande engendrée par les importations. Il a également détaillé la production de viande bovine qui augmente à l’échelle mondiale alors qu’elle baisse de 5 % en France et de 7 % en Europe. En Allemagne, par exemple, la consommation de viande bovine baisse de 7 à 15 %. Il conclut sur la tendance globale, «nous ne manquerons pas de viande, la production française ne représente rien à l’échelle mondiale et il faut absolument se protéger contre le Mercosur pour pouvoir continuer à exister». La qualité de la production française sert aujourd’hui encore de bouclier par rapport à l’importation mais la part de viande venue d’Amérique du Sud continue de progresser avec une hausse de 20 % pour le Brésil et 12 % pour l’Argentine.
Malgré une légère baisse de la quantité de viande consommée par habitant, Dominique Guineheux ne s’inquiète pas de l’importance des végans qui ne représentent pas 1 % de la population. En revanche, il souligne qu’il faudra être attentif aux produits de substitutions qui pourraient être plus inquiétants. Par contre, il note un changement de mode de consommation avec une baisse de 7 à 10 % d’achat dans les Gms chaque année au profit de la restauration rapide.
En pleine période de négociations commerciales, Dominique Guineheux évoque dans un premier temps les postures de chacun. Le Groupe Bigard parle de hausse lorsque les Gms parlent de baisse. Les hausses des coûts de l’énergie, des consommables, de la main-d’œuvre ont forcément un impact sur la valeur du produit, ce qui se traduit par un manque de compétitivité face à l’importation. Il faut donc une valorisation améliorée de la carcasse qui passe par une augmentation de la viande hachée car aujourd’hui, 60 % des débouchés se font en viande hachée.
En conclusion de ses propos, il évoque l’avenir la structuration du Groupe Bigard face à l’avenir de la production de viande bovine. Bien que ce soit dans le nord-est que le groupe est le moins implanté, il dispose d’abattoirs conséquents et n’évoque pas de projet de restructuration. Mais face à une baisse de 700.000 bovins annoncée d’ici 2030, ce qui représente 10.000 bovins abattus en moins par semaine, il ne faudra plus monter de nouveaux abattoirs mais plutôt mettre aux normes les existants ou fermer ceux qui ne répondraient plus aux normes.
Enfin, concernant les prix, il évoque une évolution des cours européens, le prix allemand devrait remonter après la forte décapitalisation opérée chez nos voisins, ce qui engendrera une baisse de la concurrence voisine sur les marchés.