Le conseil d’administration de la Fdsea de la Moselle était réuni mardi 13 février à Morhange et a ainsi pu apprendre en avant-première les avancées sur la dérogation à l’obligation de justifier de 4 % de jachères en 2024.
Les membres du conseil d’administration étaient réunis afin de préparer l’assemblée générale de la Fdsea de la Moselle qui aura lieu vendredi 23 février à Metz-Grigy.
Fabrice Couturier, président de la Fdsea, a profité de l’occasion de cette réunion statutaire pour faire part aux administrateurs, d’un scoop appris à l’occasion d’un échange téléphonique avec le président de la Fnsea quelques minutes plus tôt.
L’exemption aux obligations de jachères était réclamée par les agriculteurs lors des grandes manifestations qui ont éclaté en France et dans plusieurs pays européens en janvier. Pour la Fnsea, «imposer 4 % de surfaces agricoles improductives en Europe est un non-sens» avait-elle indiqué dès le mois de novembre 2023.
«Les demandes du syndicalisme ont finalement été entendues», se félicite le président de la Fdsea de la Moselle. Après divers rebondissements, la commission européenne a adopté le règlement permettant de déroger à l’obligation de jachères.
Une opération en trois temps
La proposition de la Commission européenne de dérogation aux obligations de la conditionnalité de la Pac sur les surfaces non productives, notamment les jachères, présentée le 31 janvier, n’a pas fait l’unanimité. Lors de l’examen du projet de texte en comité de gestion le 5 février, aucune majorité ne s’est dégagée entre les États membres.
Le 9 février, soumise à un vote des États membres, la proposition de la Commission européenne de dérogation aux obligations de la conditionnalité de la Pac sur les jachères n’a pas reçu la majorité qualifiée requise pour être adoptée. Une dizaine de délégations reste opposée au règlement, estimant que celui-ci est trop restrictif.
Après deux années de dérogation quasi totale à l’obligation de réserver 4 % des terres arables à des éléments non productifs, aux fins d’augmenter les productions et compenser notamment la perte de l’offre céréalière liée à la guerre, le projet sur la table prévoyait d’y autoriser uniquement la culture de légumineuses, de cultures fixatrices d’azote ou de cultures dérobées, à la double condition de ne pas utiliser de produits phytosanitaires et d’atteindre au total 7 % de surface de cultures intermédiaires ou fixatrices d’azote.
Pour contenter les États membres considérant que cette proposition n’était pas assez souple, Bruxelles avait revu à la baisse ses exigences sur la limite de 7 %. Résultat : l’Allemagne, notamment, qui souhaite une mesure la plus «écologique» possible n’a pas soutenu le nouveau texte.
Dénouement sur fond de grogne
Le 13 février, malgré les réticences de quelques États membres, et dans un contexte de grogne agricole dans plusieurs pays européens, la Commission européenne a adopté le règlement permettant de déroger aux obligations de la conditionnalité de la Pac sur les jachères.
Les pays qui le souhaitent pourront donc autoriser les agriculteurs à utiliser les 4 % des terres arables censés être réservés à des éléments non productifs, pour y cultiver des légumineuses, des cultures fixatrices d’azote ou des cultures dérobées à condition de ne pas avoir recours à des traitements phytosanitaires.
Par rapport à la première version du texte présentée par la Commission européenne, deux éléments ont été modifiés : l’exigence de surfaces de cultures fixatrices d’azote a été ramenée à 4 % et le facteur de pondération de 0,3 appliqué aux cultures intermédiaires est porté à 1.
La mesure s’applique rétroactivement à compter du 1er janvier 2024.
Dans un communiqué du 13 février, le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, indique que «la France mettra [en œuvre] cette dérogation, conformément aux annonces du gouvernement».
Quelle conséquence pour les assolements ?
Le cumul des obligations liées à la Pac pour avoir l’accès aux écorégimes et à la directive nitrates qui concernent la couverture des sols avant une culture de printemps, impose aux agriculteurs de Moselle d’avoir des Cipan avant leurs cultures de printemps.
La modification du coefficient pondérateur des cultures dérobées passant de 1 ha = 0,3 ha de culture fixatrice d’azote à 1 ha pour 1 ha, simplifie nettement la situation.
En effet, pour chaque hectare destiné à une culture de printemps en 2025, qui sera couvert par une Cipan à l’automne 2024, il suffira de déclarer ces surfaces en cultures dérobées dans le dossier Pac 2024, jusqu’à atteindre un minimum de 4 % de la surface en terres arables de l’exploitation pour couvrir les obligations liées à la Bcae8, sur les surfaces improductives.
Si des légumineuses composent déjà l’assolement à hauteur de 4 %, il n’y aura aucun besoin de déclarer des cultures dérobées. Pour les agriculteurs ayant prévu dans leur assolement des surfaces en jachères, en fonction du couvert choisi, ils pourront déclarer ces surfaces en légumineuses ou prairies temporaires afin de pouvoir les récolter. Ils peuvent également les maintenir en jachères, en respectant les règles d’entretien des jachères.