
La ministre de l’Agriculture et de l’Alimentation s’est rendue en Moselle sur l’exploitation maraîchère du Château du Geroldseck. Au menu, l’agriculture bio qui fête les quarante ans du label Bio, l’accès aux marchés publics des collectivités et l’accompagnement financier de la filière.
Patrick Sinteff, maire de Niederstinzel, a accueilli Annie Genevard avec une citation de Jean d’Ormesson, «tout le bonheur du monde est dans l’inattendu». Il avouait ainsi sa surprise lorsque le député, Fabien Di Filippo, à l’initiative de la venue de la ministre de l’Agriculture, en Moselle, l’a prévenu. Mais pour le premier magistrat de ce petit village de quelque 300 âmes, l’essentiel de cet événement devait être «ce que Madame la ministre de l’Agriculture apportera aux agriculteurs».
Pour la recevoir, la ferme du Geroldseck a été retenue. Nicolas Deom et sa compagne Adeline, sont maraîchers en agriculture biologique, juste à côté du Château du Geroldseck.
L’intérêt du regroupement
Ancienne exploitation d’élevage, la ferme familiale a été reconvertie il y a 15 ans en maraîchage bio. Cultures de plein champs et 5.000 m2 de serres accueillent quelque 40 variétés de spécialités légumières (carottes, pommes de terre, tomates, courgettes…) et fruitières (fraises, melons…).
Le principal débouché consiste en l’approvisionnement d’un magasin de producteurs à Sarrebourg. 70 % des ventes y sont réalisées. Nicolas insiste sur «l’intérêt du regroupement de plusieurs producteurs» dans cette démarche de vente directe de produits locaux. Le reste de la production alimente les étals d’un local de vente à la ferme et des casiers en libre-service.
Une autre filière prospectée vise les collectivités. Mais là, Adeline et Nicolas interpellent la ministre. «Plusieurs établissements pourraient se fournir chez nous», affirme l’exploitant. Les quantités, la qualité, comme les prix de vente, ne semblent pas faire obstacle au développement de ce débouché. Le problème serait ailleurs. L’assistance livre pêle-mêle des arguments. On évoque «l’information et la formation des gestionnaires», «la plus ou moins bonne volonté des décideurs», ou encore «des sollicitations ponctuelles sous couvert de journées locales».
Des agents de l’État
Interpellée, Annie Genevard tente de passer la patate chaude aux nombreux élus locaux présents et la réponse ne tarde pas. «Les gestionnaires se trouvent souvent être des agents de l’État», rétorque un élu régional. Puis, chacun livre les initiatives prises dans le sens de la promotion des produits locaux.
L’échange va rapidement mettre en évidence «l’obstacle que représente le code des marchés publics et le fonctionnement des appels d’offres annuels». Après avoir rappelé plusieurs points de la loi donnant un accès privilégié aux productions sous signes de qualité et issues de l’agriculture biologique, Annie Genevard s’est engagée à «une collaboration avec sa collègue de l’éducation nationale» pour améliorer la situation.
Autre sujet évocateur des difficultés rencontrées par le jeune couple de maraîchers, l’emploi. Pour eux comme pour nombre de secteurs économiques, le recrutement des salariés apparaît comme une difficulté difficilement surmontable. Et ce, d’autant plus que l’activité de maraîchage s’avère des plus gourmades en main-d’œuvre.
Pour la ferme du Geroldseck, la solution a été trouvée en faisant appel à un prestataire spécialisé, lui-même ayant recours à des candidatures étrangères.
Ambition maintenue
Même si la ministre évoquait avec enthousiasme les quarante années du label Bio, la réalité des marchés n’a pas été éludée. La consommation baisse, «une crise débutée avec le contexte inflationniste en 2022», expliquait Fabien Di Filippo. Une situation qui avait conduit, en septembre 2023, Marc Fesneau à annoncer une campagne de communication dotée de 5 M€ par an sur 2024, 2025 et 2026 afin de relancer la demande. Le contexte général des finances publiques pose la question de la pérennité de cette enveloppe. Sur ce point, Annie Genevard a voulu rassurer, au moins à court terme, «la communication se déploie comme prévu» a-t-elle affirmé, rappelant au passage le «maintien de l’ambition 21 % de surfaces en Bio en 2030», inscrite dans la loi d’orientation agricole (Loa). Un objectif «politique» que plusieurs invités ont souhaité pondérer en cohérence avec la demande des marchés et la nécessité de trouver sur ces mêmes marchés «une rémunération décente pour les producteurs».
Concernant les aides à l’investissement, Annie Genevard avait annoncé le 14 mai, lors d’une audition à l’Assemblée, une réduction des crédits du Fonds avenir bio. En 2025, il bénéficiera selon elle de 8,8 M€, contre 16,4 M€ en 2024. Évoquant «une lettre du Premier ministre arrivée la veille et incitant à faire des économies», la ministre s’attache à «aller chercher des aides européennes».