
La Section nationale des propriétaires ruraux de la Fnsea (Snpr) a tenu son assemblée générale annuelle le 16 mai à Paris. L’occasion de revenir sur les combats de l’année écoulée et ceux à venir.
Les représentants des propriétaires ruraux de toute la France se sont retrouvés le 16 mai à Paris pour tirer le bilan de l’année écoulée et dresser quelques perspectives pour les prochains mois. Raymond Muller, secrétaire général de la Snpr, a ainsi rappelé que «l’année 2024-2025 a été particulièrement impactée par la campagne pour les élections des Chambres d’agriculture (Eca). […]. Cependant, au-delà des Eca, cette année a été marquée par une instabilité politique indédite sous la Ve République». Ce qui n’a pas empêché les propriétaires ruraux de glaner quelques victoires, au premier rang desquelles le relèvement des plafonds d’exonération de droits de donation ou de succession pour les biens ruraux mis à bail à long terme.
L’action résolue de la Fnsea et du Snpr a permis que ces nouveaux plafonds s’appliquent dès 2025 à tous les baux à long terme, quelle que soit leur date de signature, contrairement à ce qui était initialement prévu.
Après un temps d’échange, en particulier sur les Eca, l’assemblée générale a unanimement appelé à une réforme en profondeur du mécanisme d’inscription sur les listes électorales du collège des propriétaires ruraux. Elle s’est aussi penchée sur le développement de la fibre optique en aérien en bordure de haies. La fibre est souvent installée sur des poteaux mal positionnés et mal entretenus. Conséquence : les propriétaires ruraux ne peuvent pas prendre de mesures suffisantes pour les protéger. Même les élagueurs professionnels ne veulent plus assumer ce genre de chantiers. Car la moindre coupure coûte des milliers d’euros de réparation ; un risque insupportable pour les propriétaires ruraux.
C’est pourquoi, les membres de la Snpr ont unanimement appelé à une réforme de la responsabilité de l’entretien des réseaux télécoms, à charge pour l’opérateur de réaliser l’entretien.
Aucune fatalité
L’après-midi, en partie consacré au rapport moral, a consisté en une réflexion sur le renouvellement des générations et la transition agricole, pour répondre aux enjeux environnementaux et climatiques. «Ce sont des défis de même ampleur que ceux de la modernisation agricole dans les années 50-60. Le chantier qui se présente à nous est donc colossal et les propriétaires ruraux y joueront un rôle capital», a affirmé Raymond Muller. Premier porteur de foncier, les propriétaires ruraux permettent aux agriculteurs d’y accéder à des conditions économiquement avantageuses.
Cependant, «de nombreux territoires ne trouvent plus de bailleurs», a regretté le secrétaire général pour qui, il n’existe aucune fatalité : «Encore faut-il leur redonner leur place, leur redonner l’envie d’investir, de s’impliquer et de mettre à bail […] ensemble, travaillons et agissons !», a-t-il exhorté. La transition était toute trouvée pour ouvrir la table ronde sur le thème «Quelle réforme foncière pour l’agriculture française ?». Yohann Barbe, membre du bureau de la Fnsea, Julien Rouger, membre du bureau des Ja, et Denis Labri, secrétaire général de la Section nationale des fermiers et métayers (Snfm) ont pu exposer le point de vue de leurs organisations respectives.
L’occasion pour les trois orateurs de réaffirmer la nécessité de travailler sur ce sujet. Ils se sont accordé sur le fait que les circonstances politiques instables ne sont pas propices pour débattre d’un sujet aussi complexe et sensible que le foncier. Mais les trois intervenants ont convenu «qu’il faut travailler dès aujourd’hui pour être prêt le jour où les circonstances redeviendront propices».
Cinq propositions
Dans son discours de clôture, le président de la Snpr, Patrice Joseph, a rappelé que si les propriétaires-bailleurs «cessent de jouer leur rôle, les conséquences seront lourdes pour les exploitants et l’agriculture française».
Pour lui, il est urgent de prendre en main le problème : 12 millions d’hectares vont changer d’exploitants d’ici huit ans. Pour cela, il suggère cinq pistes : adapter le statut du fermage en transcrivant dans la loi l’accord conclu entre la Snpr et la Snfm ; redonner un équilibre économique aux baux, notamment en diminuant la fiscalité foncière ; simplifier les contraintes administratives pesant sur les propriétaires ruraux ; les sécuriser face aux risques du développement de la fibre optique ou de l’agrivoltaïsme ; préserver le patrimoine foncier en cas de contraintes environnementales.
Le discours et la journée se sont clos par une citation de Georges Pompidou : «Arrêtez d’emmerder les Français ! Il y a trop de lois dans ce pays, on en crève, laissez les vivre, et vous verrez, ça ira beaucoup mieux». Et cela vaut évidemment pour les propriétaires ruraux.
Les propriétaires trop souvent ignorés
Préparée par Henri Babeau (Aube), et présentée par Claude Mauprivez (Marne), l’intervention du Grand Est a porté sur trois points :
1) Élections Chambre : «La Région constate que les représentants des propriétaires n’ont que très rarement accès au Bureau malgré leur demande. Pourtant, les propriétaires financent de 20 à 25 % du budget des Chambres. Alors, faute d’être représentés, pourquoi ne pas supprimer cette taxe additionnelle ou a minima mettre 99 % à la charge du fermier ? Par ailleurs, nous constatons que les propriétaires ne sont pas assez consultés, alors qu’ils sont un maillon essentiel dans les installations Ja ou d’autres dossiers comme l’environnement».
2) Aléas climatiques : «La région Grand Est est régulièrement impactée. Ces aléas ainsi que les épizooties ouvrent à des dégrèvements de la Tfnb au profit des fermiers. Aujourd’hui, certains d’entre eux demandent également une réduction de fermage pour faire face à ces aléas. Nous, propriétaires, nous opposons à toute réduction sur le fermage. C’est aux fermiers de souscrire une assurance, et à l’État d’accompagner les exploitants dans des cas de force majeure».
3) Zones humides et périmètres de captage : «La législation se renforce sur les aires d’alimentation de captage qui englobent des périmètres toujours plus grands et où l’on va chercher des métabolites de plus en plus nombreux. Pour les exploitants, cela va se traduire par des contraintes d’assolement accrues et des restrictions phytos. Pour les propriétaires, cela risque fort de créer des dépréciations de leurs terres. Les uns et les autres doivent être indemnisés».